Dans le sillage de la révolution industrielle 4.0, l’entreprise chaudefonnière Horosys réinvente la production microtechnique en proposant des lignes de montages miniatures à bas coûts et modulaires.
Ce n’est plus qu’une question de temps pour qu’émerge un nouveau mode de production qui va bouleverser l’automation classique: les micro-usines. Parmi les acteurs de ce changement, Horosys, une entreprise spécialisée dans les solutions ultra compactes d’automation dans le domaine de la microtechnique. Son fondateur, le valaisan Christophe Taramarcaz, a d’abord passé 25 ans à concevoir des machines pour l’horlogerie avant de plancher sur ce nouveau paradigme de production. Il explique: «Durant toutes ces années, je me suis aperçu que la tendance était à la course technologique, avec des machines chères à élaborer et à entretenir. J’ai créé Horosys dans l’esprit de pouvoir apporter de l’automation d’une manière générale, mais plutôt pour des gens qui font des petits volumes de production et qui aujourd’hui ne trouvent personne sur le marché pour développer des machines spéciales, flexibles et fiables, adaptées à leur budget.»
Une maquette de la Smart Micro Factory
L’idée derrière tout cela est de repenser la façon de produire: pas besoin d’une machine qui fait trois tonnes pour usiner de petits composants. Pour illustrer la révolution induite par ce nouveau mode de production, Christophe Taramarcaz donne l’exemple d’une entreprise qui souhaiterait réaliser des assemblages de rouages horlogers: «en automation classique, pour faire une machine, on va vite parler de budgets entre CHF 200’000.- et CHF 400’000.-. Aujourd’hui, nous arrivons à proposer des solutions entre CHF 100’000.- et CHF 150’000.- pour les mêmes manipulations.»
Une visite au Japon et la création d’un consortium
Pour Christophe Taramarcaz, le point de départ de l’aventure passe par le Japon. Après la création de l’entreprise en 2015, cet ingénieur en microtechnique a l’occasion de visiter le consortium Desktop Factory (DTF), dont le but est de développer des chaînes de production de petite taille. Leur démonstrateur, une ligne de production d’un jouet, est convaincant: tenant sur six mètres de long, l’ensemble était constitué de mini-modules, chacun dédié à une opération spécifique (usinage, galvanisation, assemblage, nettoyage), jusqu’au produit final. Dès 2016, Horosys jette les bases d’une collaboration avec un partenaire stratégique: l’entreprise montréalaise Mecademic. Cette dernière a inventé un mini bras robotique six axes, le Meca500, permettant de manipuler des pièces ultra précisément (cinq microns). Outre une technologie “open source” facile d’utilisation, le robot affiche un prix abordable, environ CHF 15’000.-.
L’année suivante, avec l’aide du coach René Bart, Christophe Taramarcaz monte un dossier dans le cadre de la LPR-Neuchâtel (loi fédérale sur la politique régionale) et obtient un financement décisif. Le projet, baptisé Smart Micro Factory, consiste à réaliser deux lignes pilotes pour des partenaires industriels locaux. La première pour la manipulation d’autocollants pour cadrans de montres, la seconde pour un fabricant de rouages horlogers. Du côté R&D, un partenaire s’occupe de développer un software tandis que la Haute Ecole Arc Ingénierie est mandatée pour mettre au point une solution économique de pilotage du Meca500. L’école crée ainsi une bague de commande qui s’intègre au bras du robot et permet de le manipuler d’une manière très fine, directement à la main, sans passer par un clavier et un écran. «Le défi était de parvenir à faire tenir ces lignes sur un établi tout en restant dans des coûts raisonnables, de travailler avec des technologies d’intelligence embarquée fonctionnant par connexion Ethernet (industrie 4.0), avec comme but final de proposer quelque chose à la portée des petites PME», explique Christophe Taramarcaz.
Aujourd’hui, Horosys emploie quatre personnes et développe des solutions de stations de travail et de robotique ultra compactes. Le concept de Smart Micro Factory représente désormais 80% de l’activité de l’entreprise, les 20% restants concernent encore le développement de solutions classiques d’automation. Horosys n’est pas le seul acteur actif dans ce domaine dans le canton. Sur le Parc technologique de St-Imier, la plateforme public-privé MicroLean-Lab poursuit la même idée: créer un premier prototype semi-fonctionnel dans l’Arc jurassien d’ici 2020, dans l’optique de fournir à l’industrie régionale des solutions de productions miniatures, modulaires et interconnectées. L’usine de demain sera simple d’utilisation, plus efficiente énergétiquement, modulaire et programmable à loisir. Le tout pour un coût de R&D inférieur. Dans une région à la tradition horlogère centenaire, nul doute qu’un mouvement de fond est en train de s’amorcer.
Un module d’assemblage conçu avec le bras robot Meca500
L’avis de l’entrepreneur
Concernant le projet Smart Micro Factory et l’aide apportée par platinn, Christophe Taramarcaz se dit très satisfait du résultat et explique: «Pour un tel projet, vous avez besoin de tout un tas de compétences: des gens qui amènent le savoir-faire en terme de manipulation fine, des personnes qui savent faire l’interface entre l’homme et la machine, et d’autres qui pensent et développent le concept en soi pour arriver au produit final. Tous ces corps de métiers sont nécessaires pour que la solution aboutisse. Avec René Bart, j’ai trouvé quelqu’un de très compétent, à l’écoute, qui connaît très bien le milieu économique régional. Il s’est tout de suite passionné pour le projet. Grâce à lui, nous avons pu trouver nos clients de ligne pilote. Il a fait un gros travail de mise en relation. C’est aussi par son entremise qu’Horosys a participé aux 24h d’Innovarc 2017, un cycle de conférences, d’ateliers et de moments de réseautage, organisées par Microcity Pôle d’innovation Neuchâtel. Enfin, il a fourni beaucoup de soutien pour la création du dossier SMF pour la demande de financement public.»
L’apport de platinn
René Bart, le coach platinn du Service Coopération et Organisation ayant accompagné Horosys, ne cache pas son enthousiasme quand on lui demande son avis sur le projet: «Ça a été le coaching le plus passionnant de mon année 2017. La collaboration a été très efficace. Au moment où je l’ai rencontré, Christophe Taramarcaz était fraîchement indépendant, mais il avait déjà une très longue expérience d’ingénieur et un très bon réseau d’affaires. J’ai été fasciné par le concept et la réalisation du projet de Smart Micro Factory. Pour moi, c’est exactement ce qu’on attend de l’industrie 4.0, c’est l’avenir. Le financement obtenu dans le cadre de la LPR-Neuchâtel a permis de concrétiser cette vision. Christophe est un pionnier et un visionnaire. Sa force, c’est d’avoir développé un produit et pas seulement un concept. Il a désormais des clients pour sa micro-usine, une technologie évolutive de pointe ainsi qu’un positionnement très intéressant sur le marché de l’automation.»
Pour en savoir plus…
www.horosys.ch
par Arnaud Gariépy